Concours de nouvelles 2024
2eme Prix Adultes
" Dossard 733 " de Claude CAVAGNARO 
Je suis afro-américain, ce petit adjectif placé devant le mot américain fait une énorme différence en Alabama. J’ai mis du temps à m’en apercevoir, mais dans la région le noir n’a jamais été la couleur la plus appréciée. Mes parents travaillent dans des plantations, comme la plupart des gens de couleur dans le sud profond des Etats-Unis. Je pensais pourtant avoir eu plus de chance qu’eux, car ils avaient pu m’inscrire au collège du comté…mais les illusions sont tenaces au pays des libertés !
Certains jours pluvieux, j’avais même accès au car scolaire. En fait, cela n’avait rien à voir avec la météo et dépendait plutôt de qui conduisait le bus de ramassage. Quand c’était Sam, tout allait bien. Il n’arrêtait pas de me donner des conseils et de me dire de ne surtout pas m’asseoir à l’avant. Devant ou derrière, je m’en foutais du moment qu’il pouvait m’éviter les huit kilomètres qui séparaient ma maison… de l’école. Lorsque Sam était absent ou malade c’était son patron qui le remplaçait. Il ne s’arrêtait jamais à mon arrêt. Ces jours-là, j’y allais en courant ! J’arrivais au collège, le tee-shirt tout transpirant, mais toujours à l’heure.
Mon prof de sport guettait régulièrement mon arrivée. Il était gentil Monsieur Johnson, il voulait que j’intègre la section athlétisme du collège, et insistait pour rencontrer mes parents. Un dimanche matin à la sortie de l’église, Monsieur Johnson les attendait dans sa Ford rutilante. C’était la première fois qu’une automobile s’arrêtait dans notre bourgade, et lorsqu’il leur proposa de les raccompagner chez eux, tous dévisagèrent mes parents d’un regard envieux, et ma mère baissa les yeux. Arrivé devant notre domicile, mon père proposa un café à mon professeur, et me demanda de les laisser tranquilles. Il devait, disait-il, discuter de choses importantes avec lui. Ma mère paniquée à l’idée de laisser entrer un blanc dans son intérieur, le servit sur l’avancée en bois qui lui tenait lieu de terrasse. De loin, je voyais mon père balancer sans cesse sa tête de droite à gauche en signe de désapprobation. Finalement après de longues tergiversations, il fut décidé de ne rien décider et d’en référer, dimanche prochain, à la seule autorité qui trouvait grâce à ses yeux : le pasteur de l’église. C’est lui qui, à force de persévérance, arriva à le convaincre du bien-fondé de cette démarche pour mon avenir. Ma mère approuva.
Mon intégration dans l’équipe d’athlétisme provoqua quelques remous au sein du collège. Ce n’est qu’à ce moment-là que je compris « les choses importantes » que mon père voulait clarifier avec mon professeur. C’est également ce jour-là que le mot racisme entra pour la première fois dans ma vie.
J’ai dû supporter pendant toute une année, les quolibets et les cris de singe de la plupart des élèves. Tout m’était interdit, même l’accès aux douches après les entrainements. Malgré tout, j’ai pu terminer mon année sans trop de souci… évitant tout de même de me laver avec l’équipe. C’est dans l’indifférence que j’ai gagné mes premières courses. Puis peu à peu, mes performances commencèrent à inquiéter, et j’ai même cru déceler un peu de jalousie au sein de l’équipe. Le jour des examens de fin d’année, une plainte de la part des parents de mes coéquipiers atterrit sur le bureau de la direction du collège. Tous contestaient ma présence sur la ligne de départ. Heureusement Monsieur Johnson sut trouver les bons arguments pour ma défense, et leur tint tête. La direction du collège respecta ses choix… dans un premier temps.
Cette demi-défaite irrita profondément les parents, surtout sa dernière phrase. « Après tout, leur avait-il dit au sortir de ce tribunal improvisé, que le meilleur gagne. C’est ça le sport ! »
Mes parents étaient venus assister à ces épreuves de fin d’année. Seuls noirs au milieu de ce troupeau de loups blancs, ils traçaient leur chemin sans lever la tête. Mon père qui n’avait jamais jusqu’à ce jour baissé les yeux devant quiconque, me fit le plus de peine. Aujourd’hui, je devais le remercier de tous ces efforts.
Bien dans mes starting-blocks, j’attendais les ordres du starter. « A vos marques » - genou à terre, mains sur le sol - « prêt » - réussir ma phase de démarrage - « feu » - me propulser vers l’avant et allonger progressivement ma foulée. Regarder droit devant, et ne penser à personne. Quelques secondes après, un immense silence s’empara du campus. Tous regardaient le chronomètre : 12 secondes 14’’. Le record du collège venait d’être battu. Ce n’est qu’en me retournant vers mon père que j’ai su que j’avais gagné ! C’est mon entraineur qui me sauta en premier dans les bras, « 12 secondes 14’’, tu t’en rends compte, 12 secondes 14’’ n’arrêtait-il pas de me dire, c’est incroyable pour un étudiant ! » Puis ce fut ma mère en larmes, et enfin mon père tout en retenue. Il n’avait pas besoin de parler, son œil humide suffisait à mon bonheur. Malheureusement pour Monsieur Johnson, cette victoire signifia aussi sa mise à l’écart. Il n’avait pas mesuré la portée de sa phrase de l’après-midi, et avait oublié qu’en Alabama, ses propos induisaient qu’en cas de défaite de leurs enfants, un noir était plus fort qu’un blanc !
Sans emploi, il me proposa de devenir mon entraineur personnel, et me fit intégrer l’université de l’Ohio, où mes résultats sportifs attirèrent l’attention de la conférence d’athlétisme universitaire. J’avais maintenant deux ans pour me mesurer aux athlètes des dix meilleures universités, et espérer une éventuelle sélection pour les jeux olympiques.
Debout aux aurores, j’enchainais jour après jour les tours autour de l’ancien terrain d’entrainement à demi-abandonné et triste de mon université. Les hivers étaient rudes et monotones. L’été, je courais dans les bois bordant le stade. J’adaptais mes efforts en fonction des différents dénivelés que m’offrait la colline. Monsieur Johnson ne cessait de me répéter, « le foncier petit, il n’y a que ça de vrai, le reste, on verra plus tard ». Au premier frimas, je n’avais d’autre choix que de retourner dans la fadeur de cette ovale sans âme et tourner. Tourner encore et toujours. Quand Monsieur Johnson voyait les doutes envahir mes convictions, il me répétait encore « le foncier petit, le foncier… ». Enfin, les derniers mois furent consacrés à la préparation physique. J’alternais fractionnés et squats inlassablement pour renforcer ma masse musculaire. Le discours de Monsieur Johnson avait changé « l’explosivité petit, travaille ton explosivité ». Deux mois avant les championnats qui validaient les sélections, l’accent fut mis sur le travail de vitesse. Petit à petit je me suis affiné, j’ai progressé, j’ai mûri. J’approchais même, lors de ces sélections, les fameuses 10 secondes 03’’du record du monde de la discipline. J’étais devenu pour la presse leur plus grande chance de médaille olympique. Comble de l’ironie, j’ai même reçu, dans les jours qui suivirent, un télégramme d’encouragement de mon ancien proviseur me demandant de ne surtout pas oublier de mentionner le collège de mes débuts.
Quinze jours après, j’embarquais en direction de l’Europe. A bord, l’euphorie était palpable et l’entrainement toujours aussi soutenu autour des différents ponts. Les disparités étaient pratiquement absentes au sein de l’équipe nationale. Bien sûr les gens de couleur partageaient la même cabine, mais l’accès aux douches ne nous était pas interdit ! Au 2ème jour de traversée, Monsieur Johnson fit une crise cardiaque en plein milieu du repas. Malgré l’intervention rapide du médecin de bord, il décéda le lendemain. Avant de mourir, il trouva la force de me murmurer ses derniers conseils « écoute-moi petit, la gloire ça ne se rêve pas, ça se vit… mais n’oublie jamais les vraies valeurs qui sont en toi. Il y a dans la vie des combats bien plus importants qu’une médaille. Souviens-toi toujours d’où tu viens, et qui tu es ». Ce furent ses derniers mots. C’était le premier blanc à m’avoir tendu la main. Je lui devais ma carrière mais également l’homme que j’étais devenu. Il a été mon coach, mon mentor, et l’exemple à suivre, mais surtout… il a été mon ami ! Si près du but, je ne devais pas le décevoir, après tout, je lui devais bien ça !
Le premier accroc de ces jeux intervint lors de la réception de bienvenue de mon équipe, le siège du comité olympique ne pouvant accueillir les 310 athlètes de notre délégation. Un tirage au sort désigna les participants à ce cocktail, et je dus rester avec quelques compatriotes… de même couleur, au village olympique. Cela ne choqua personne au sein de ma délégation.
1 août – 16 heures 44
La ville était en fête, et arborait ses plus belles couleurs. Le long des grandes avenues qui nous conduisaient vers le stade, les drapeaux du pays organisateur concurrençaient les drapeaux olympiques. Chaque rond-point explosait de fleurs multicolores, et des milliers de confettis s’envolaient des balcons pour venir s’écraser sur nos visages émerveillés. Les barrières déployées pour contenir la foule affichaient d’énormes banderoles où le mot « bienvenue » était écrit dans toutes les langues. Tout sur notre trajet n’était que joie et ferveur. C’était la fête avant la fête !
Tout était parfait, même le soleil était au rendez-vous de cette cérémonie d’ouverture. Entassé dans les entrailles de ce monumental stade olympique, j’attendais de sortir dans la lumière. L’ordre d’apparition de chaque délégation avait été méticuleusement préparé par le service de propagande. Aussi surprenant que cela puisse paraître, le 1er groupe à être autorisé à pénétrer au pas cadencé sous les applaudissements nourris de cette foule hétéroclite, fut la jeunesse en pleine mutation et en habit militaire de ce beau pays. L’entrée des athlètes de toutes les nations en tenue d’apparat accentua cette frénésie collective, mais tout cela n’était rien comparé à l’hystérie que produisit l’apparition de leur sélection nationale en fin de défilé. Un coureur portant une torche pénétra dans le stade olympique, et éclaira une gigantesque vasque. C’était la première fois qu’un tel rituel était instauré, les 120 000 spectateurs ébahis n’en croyaient pas leurs yeux.
L’ovation réservée à leur chancelier déclarant ouvertes les XIèmes Olympiades fut également impressionnante. Les saluts hitlériens transformèrent les tribunes en une forêt de bras tendus et exaltèrent un patriotisme qui devenait parfois un peu trop… gênant. La cérémonie s’acheva sur une envolée de colombes blanches symbolisant la paix et la fraternité entre les peuples. L’hospitalité et l’organisation allemandes reçurent les éloges de tous les journalistes présents. Ils ne comprirent que plus tard, que l’image offerte cette année-là à Berlin d’une Allemagne tolérante et accueillante n’était que de la poudre aux yeux.
2 août - 10 heures
C’est au matin que mes épreuves de qualification commencèrent. J’avais hérité du dossard 733, sans savoir pourquoi, je savais déjà que ce numéro me porterait chance !
Le premier tour, assez peu relevé, ne fut qu’une simple formalité. C’est dans l’après-midi que les choses sérieuses débutèrent, je me retrouvais face à des champions d’une tout autre trempe que dans mon tour préliminaire. Mais Monsieur Johnson avait fait du bon travail, j’arrivais à mon pic de forme au bon moment. J’égalais lors de ce deuxième tour qualificatif le record du monde du 100 mètres avec 10 secondes 03’’. En signe de victoire, je levais moi aussi mon bras au ciel…
Dans la nuit, David, un camarade de ma sélection, vint frapper à la porte de ma chambre. Il voulait discuter de la dangerosité de ma conduite de l’après-midi, et de mon geste de victoire bras tendu qu’il jugeait inconsidéré. Un peu interloqué par sa démarche, il ajouta qu’il venait d’être écarté de l’équipe de relais, à la demande du régime en place. Mon ignorance sur la montée du fascisme en l’Allemagne le consterna ! Patiemment malgré l’heure tardive, il m’expliqua tout du contexte socio-politique de ces jeux… De la demande formulée par leur führer d’exclure une certaine catégorie de la population de toutes les épreuves sportives, aux déportations subies par les tsiganes. Enfin pour finir, il m’expliqua les mesures anti-juives et les pancartes leur interdisant l’accès aux lieux publics ! Devant mon scepticisme, il renchérit : « ces panneaux n’ont été retirés des devantures qu’une semaine avant la cérémonie d’ouverture. Tout ce que tu vois, la ville en fête, la liesse populaire, les banderoles de bienvenue, ce n’est qu’un miroir aux alouettes… un écran de fumée jeté à la face du monde pour masquer leurs exactions, et instaurer pendant la durée des jeux un semblant de démocratie ». Je restais effaré par les confidences de mon ami et ma naïveté. Un peu surpris d’apprendre que le noir n’était plus la seule couleur du désespoir dans le monde, j’étais loin de me douter que les cagoules blanches de mon enfance avaient fait autant d’émules en Europe.
Ma nuit fut courte, ce qui n’était pas forcément de bon augure avant les demi-finales.
3 août - 15 heures
La présence d’un athlète allemand dans la première série des demi-finales galvanisait un public prêt à s’enflammer. Chauffé à blanc, tout un stade tapait en cadence dans ses mains. Avant le départ, personne n’envisageait une défaite de leur favori, pas plus les spectateurs que l’élite du troisième Reich dans sa tribune présidentielle. La pression exercée sur le sprinter allemand était énorme, et allait bien au-delà d’une simple victoire sportive ! C’est un stade au bord de la folie qui exulta lorsque l’idole de tout un peuple franchit la ligne d’arrivée en pole position. Le chronomètre enfin, acheva d’électriser une foule totalement acquise à son champion, quand il afficha les 10 secondes 03’’ de mon record du monde de la veille !
3 août - 15 heures 23
La deuxième demi-finale allait débuter. Tous les regards étaient maintenant tournés vers moi. Encore un peu perturbé par les révélations faites par mon ami juif, je me rapprochais sans conviction de la ligne de départ. La xénophobie, les droits de l’homme, il me fallait évacuer tout ça. Reconnecter mon esprit avec mon corps, et ne penser plus qu’à une chose… la ligne d’arrivée.
J’avais besoin pour cela de m’évader loin de ce tumulte. Retourner à la source, au point de départ de toute cette aventure. Me souvenir de ma première course au collège… ma dernière aussi. Me souvenir également des galères et des jours pluvieux. J’avais tout gardé en mémoire, comme cette phrase que Monsieur Johnson m’avait susurrée à l’oreille… « la revanche est mauvaise conseillère, ne laisse jamais la colère te couper les ailes. Fais-toi plaisir petit, le sport, c’est seulement du plaisir ! ». Au moment de m’aligner, ma concentration était telle que je m’imaginais seul dans ce stade en pleine ébullition. Seul aussi sur la piste, malgré les cinq autres coureurs. J’étais de retour mentalement sur le stade sans âme de mon université. J’entendais encore Monsieur Johnson me répéter les mêmes conseils : « le foncier petit, le foncier... travaille ton explosivité… ne rate pas ta phase d’accélération…regarde droit devant, jusqu’au bout… jusqu’à faire péter le chrono ! ».
Et puis au coup de feu tout s’accéléra, le temps, ma fréquence cardiaque et ma vitesse… ne pas dévier de mon couloir pour espérer la finale. Le souffle court, je continuais à trottiner, bien après la ligne d’arrivée. Je devais maintenant redescendre de mon nuage, revenir à la réalité du terrain, et affronter la foule hostile et le chronomètre… 10 secondes 02’’ : nouveau record du monde ! Le stade médusé n’en croyait pas ses yeux et fixait la tribune déjà désertée par ses hauts dignitaires. Désabusé par l’affront de ce « supplétif africain » de l’équipe américaine, comme avait osé me décrire le chef de la propagande nazie, le führer était descendu voir les arbitres afin de rectifier ce malentendu. A peine 2 minutes après, un officiel du CIO vint m’annoncer qu’il ne pouvait homologuer mon record, en raison d’un vent trop favorable. A deux doigts de vomir cette décision controversée, je compris à ce moment-là qu’on ne pouvait gagner face à une idéologie pernicieuse.
3 août - 16 heures 44
Seul dans mon vestiaire, je ruminais cette décision arbitrale. Personne de ma délégation n’avait osé déposer de réclamation. Cette indifférence de la part de ma propre sélection me rongeait intérieurement, et soulevait beaucoup d’interrogations en moi. Je mélangeais tout, la cause des noirs et celle des juifs, ségrégation et antisémitisme. A deux doigts de devenir fou, un officiel vint me chercher, pour la finale. A mon apparition des milliers de drapeaux à croix gammées s’élevèrent des gradins. Encore perdu dans mes introspections, j’ignorais cette ambiance nauséabonde.
Des nuages cachaient à présent le soleil, et rendaient à Berlin ses vraies couleurs. Les masques venaient de tomber. Tout autour de moi n’était que mépris et chauvinisme. Excitée par cette rivalité, la foule bafouait de cris haineux toutes les valeurs de l’olympisme. Envolés le fair-play et la fraternité entre les peuples.
Les doutes s’immisçaient à nouveau dans mon esprit, et j’avais peur de comprendre. Tout l’antagonisme entre le représentant de cette nation en pleine décrépitude et moi, avait savamment été orchestré par le führer en personne. Cette confrontation, il l’avait espérée et même voulue ! C’était sa façon de démontrer à la face du monde la supériorité aryenne sur les races inférieures. Je n’étais qu’un faire-valoir. Au moment de me diriger vers la ligne de départ, un seul combat subsistait dans cette arène, celui entre moi et moi.
« … N’oublie jamais les vraies valeurs qui sont en toi ». C’étaient les dernières paroles de Monsieur Johnson, c’était aussi ses plus énigmatiques. De quelles valeurs voulait-il parler ? Et s’il me connaissait mieux que moi ? Et s’il m’avait façonné à son image ? Celle d’un homme qui s’était battu toute sa vie contre le racisme et l’injustice. Et s’il avait tout prévu, tout anticipé ?
A quelques pas des starting-blocks, j’interpellais les arbitres officiels, sous le regard perplexe du führer et de ses sbires. Ma décision était prise. Elle était folle, comme ce rêve olympique souillé. Quelques minutes plus tard, les lettres « DNS » apparaissaient accolées à mon nom.
« DID NOT START »
Ce terme un peu barbare signifiait qu’un coureur ne se présenterait pas aujourd’hui sur la ligne de départ… ce coureur, c’était moi ! Pour toute médaille, je devais me contenter de la phrase de Monsieur Pierre de Coubertin « L’essentiel est de participer ». J’avais participé et j’avais gagné ! Surement bien plus qu’une médaille en or. J’avais gagné pour ma communauté et mon ami juif. J’avais gagné aussi pour mes parents et surtout pour Monsieur Johnson. Ce renoncement était un acte d’amour pour toutes les valeurs qu’il m’avait transmises. Loin de le trahir, je voulais au contraire lui dédier ce retrait, à lui et à toutes les personnes opprimées dans le monde. Au moment de quitter la piste sous les huées de tout un stade, je ne pus m’empêcher de ressentir pour ce peuple endoctriné une profonde peine. Mais j’étais fier de ce que j’étais devenu… un homme debout.
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